Quel est le bilan carbone du projet de LGV ?
Ce qu'ils disent :
« Concernant les émissions de gaz à effet de serre, le bilan carbone du projet de ligne à grande vitesse est positif. Le bilan carbone du grand projet ferroviaire du Sud-Ouest devient positif au bout de seulement 10 ans après la fin des travaux. » clament les défenseurs des LGV en assenant une série de chiffres qui ne démontrent rien.
Vérifions les faits.
Dans son rapport de 2014, la Cour des comptes constate : « De nombreuses études en France et à l’étranger confirment ce constat de faible effet de la grande vitesse sur le gain en émission de GES. ».
- En effet, la réalité est tout autre selon les experts. Selon Per Kageson, il faut prendre en compte le progrès technique des véhicules dans les vingt années à venir : propulsion électrique ou hybridation… Le gain attendu des émissions de GES grâce aux mutations technologiques est dix fois supérieur à celui attendu du transfert modal sur le rail. D’après cet expert, le bilan carbone entre l’avion, la voiture et le train n’est pas si clair dès que l’on intègre le paramètre « progrès technique ».
- Chester et Horvath, de Berkeley, rappellent que dans les calculs d’émissions de CO2, il faut tenir
compte de tout le cycle de vie des moyens nécessaires à l’activité de transport.
L’ADEME a une approche partielle, elle ne tient pas compte de la fabrication des voies de chemin de fer (rails, ballast, caténaires), des gares, du matériel roulant, de la maintenance, de l’entretien du matériel et du réseau et de l’énergie dépensée hors traction (chauffage, éclairage des gares, ateliers, bureaux, ventilation des parties enterrées, groupes électrogènes…). -
De plus dans le cas du GPSO les besoins en remblais sont de l’ordre de 26 millions de m3, et les besoins en matériaux nobles sont évalués à 15 millions de m3. L’étude d’impact évalue à 8 millions de m3 la capacité du marché régional à approvisionner le chantier, les apports extérieurs à trouver sont de l’ordre de 30 millions de m3. Or, les nouveaux lieux d’emprunt ne sont actuellement pas identifiés, et les impacts ne sont donc pas décrits, ni même évalués. En outre, le trafic routier pendant la durée du chantier (5 ans) est estimé à une rotation de 2360 camions par jour ouvré.
En conséquence, l’enjeu de l’ouverture de nouvelles carrières ou d’une très importante extension de carrières existantes et des impacts afférents est donc majeur, compte tenu notamment de la géologie de la zone traversée et d’une certaine probabilité de devoir faire transiter les matériaux de loin.
La commission d’enquête a ainsi déploré cette absence d’évaluation de la gestion des matériaux sur l’environnement :
« Le transport de ces millions de mètres cube de matériaux en provenance de lieux, inconnus de la commission d’enquête, aurait dû entrer dans le bilan carbone et le bilan socio-économique du projet. ». (Source : Rapport de la commission d'enquête Lignes Nouvelles/GPSO, p.532)
Pour arriver à un bilan carbone positif au bout de dix ans sur le GPSO, SNCF Réseau table sur un report modal « massif ».
La société Carbone 4, cabinet conseil en stratégie carbone, souligne que :
« Le pronostic promouvant le report modal du transport passagers de la route vers le train à grande vitesse est à envisager avec prudence […] Les études effectuées sur des LGV inaugurées dans le passé montrent que, sur l’ensemble des passagers du train, le taux de report modal en provenance de la voiture et de l’avion est généralement inférieur aux 12% pris comme hypothèse sur la LGV Est. Or, sur la LGV Lyon-Valence, par exemple, ce taux n’est que de 6% ! »
- Une étude de l'institut Sweden Nature's Associates, parue en 2009, explique que les émissions de CO2 produites par la construction d'une LGV nécessitent de très importants transferts de trafic de la route et de l'avion pour justifier un bilan carbone positif.
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Une autre étude de l’Université suédoise de Linköping conclut :
« La réduction des émissions de CO2 liée à la construction des LGV est minime et la construction de ces réseaux ne peut être considérée comme une politique environnementale réaliste.»
Elisabeth Borne, ministre des Transports, émettait les mêmes doutes en 2017 :
« J'ai demandé à mes services qu'on ait le bilan carbone [du TGV, NDLR] en tenant compte de la construction de la ligne et à mon avis le bilan carbone d'une infrastructure de ce genre, à coup de béton et d'acier, doit être intéressant et doit s'amortir sur un certain temps pour arriver à un bilan satisfaisant. » (Sénat 08/11/2017).
Quels décideurs ont lu ces rapports ?