Réduire les temps de trajet pour favoriser le report modal ?
Ce qu'ils disent :
Il est souhaitable de réduire les temps de trajet pour concurrencer l’avion et la voiture, et ainsi favoriser le report modal
Vérifions les faits.
Certes on peut l’admettre, mais ce qui n’est pas acceptable, c’est que les promoteurs des LGV surestiment les prévisions de trafic engendrées par cette réduction de temps. C’est une constante dénoncée dans de très nombreux rapports.
En 2008, la Cour des comptes constatait que « les bilans a posteriori des lignes à grande vitesse mettent en évidence une rentabilité en général bien plus faible qu’espérée initialement en raison d’une sous–estimation des coûts et d’une surestimation du trafic assez systématiques.» (Source : Rapport de la Cour des comptes « Le réseau ferroviaire. Une réforme inachevée, une stratégie incertaine », 2008, page 84.)
En 2011, dans son rapport, Hervé Mariton, s’insurge contre « une tendance générale à surestimer les bénéfices d’un projet pour les opérateurs et les gestionnaires d’infrastructures, du fait de prévisions de trafic trop optimistes.» (Source : Rapport relatif au schéma national d’infrastructures de transport, Hervé Mariton, Commission des finances, Assemblée Nationale, mai 2011.)
De plus, une partie des voyageurs captés par les LGV provient d’abord des « trains grandes lignes » du réseau classique, ce qui n’apporte donc rien en termes de report modal.
Si le CGI considère que les hypothèses supportant notamment le nombre de voyageurs supplémentaires sont « satisfaisantes et semblent robustes », il émet cependant quelques réserves concernant ces prévisions :
- « Non prise en compte de la fin des concessions autoroutières » ;
- « Prise en compte d’une évolution plus modérée des tarifs ferroviaires » ;
- « L’évolution estimée du PIB a paru élevée, et celle de la demande en fonction du PIB incertaine, ce qui peut conduire à une surestimation notable du trafic ferroviaire, sans que la contre-expertise ait pu formuler des propositions alternatives. »
En 2020, la Cour des comptes européenne, dans son rapport sur les mégaprojets transfrontaliers (dont le Y basque), pointe du doigt « l’optimisme des prévisions de trafic » :
« Les données relatives au trafic pour les infrastructures transfrontalières sont de qualité médiocre, notamment en raison de prévisions trop optimistes. Les prévisions de trafic n'étaient pas toujours fondées sur des évaluations rigoureuses du marché, et elles ne reposaient pas non plus sur des hypothèses fiables de développement économique. Certaines d'entre elles étaient au contraire très simplistes, les taux de croissance restant constants au fil du temps. Elles n'étaient pas toujours actualisées et ne faisaient habituellement l'objet d'aucune révision visant à tenir compte des retards enregistrés depuis leur établissement. » (Source : Rapport spécial 10/2020 : Infrastructures de transport de l'UE : accélérer la mise en œuvre des mégaprojets pour générer l'effet de réseau dans les délais prévus. Cour des comptes européenne, 2020, p.28)
C'est pourquoi Jacques Auxiette conseillait dans son rapport : « Il est souhaitable que nous sortions de cette logique du toujours plus vite »